Horreur, effroi, chagrin.
Il y a de ces événements qui dépassent l’entendement. La tragédie meurtrière survenue à Québec dans la nuit du 31 octobre en est. Cette année, dans le contexte d’un automne particulièrement difficile, la fête de l’Halloween venait apporter un peu de légèreté, d’insouciance et de magie auprès de plusieurs familles du Québec. Mais la violence et la tragédie ont frappé là où personne ne les attendait.
Je souhaite réitérer mes condoléances aux familles de madame Suzanne Clermont et de monsieur François Duchesne et mon soutien aux blessés.
La police mènera son enquête et nous en apprendrons davantage sur les circonstances de cette tuerie. Par contre, on sait déjà que le suspect souffrait de problèmes de santé mentale.
La question de la santé mentale au Québec doit échapper à la politique partisane. Ni le gouvernement Legault ni quelque autre parti que ce soit n’est directement responsable de cette tragédie. Les meilleurs programmes et les gouvernements les plus efficaces du monde ne pourront jamais complètement éradiquer le risque d’incidents insensés. La maladie mentale existera toujours, et sera toujours plus compliquée à gérer que les maux physiques.
Au lendemain d’un tel drame, les hommes et les femmes politiques peuvent toutefois choisir de laisser de côté leurs affiliations, et saisir l’occasion de faire évoluer notre société.
En avril dernier, dans le contexte de la première vague de la pandémie, l’ancienne première ministre Pauline Marois a donné une entrevue dans laquelle elle commentait le traitement des personnes âgées au Québec : « Je pense qu’on a fait fausse route. Et quand je dis qu’on a fait fausse route, ce n’est pas le gouvernement actuel. C’est l’ensemble des gouvernements qui se sont succédé. On a fait fausse route et aujourd’hui on en paie le prix. » Le commentaire de Mme Marois demeure non seulement d’une actualité brûlante, mais il aurait aussi bien pu s’appliquer aux enjeux des soins de santé mentale au Québec.
La situation est connue : la santé mentale est le parent pauvre de notre système. Les services sont insuffisants, l’accès est trop restreint, l’attente est trop longue. Au fil des ans, des gouvernements successifs ont tenté d’apporter des correctifs et de mettre en place de nouveaux programmes. Mais aucun n’a été aussi loin que de considérer la santé mentale au même niveau, au même titre, avec la même attention, que tous les autres problèmes de santé physique. Les sommes en cause paraissent toujours trop élevées, et d’autres besoins semblent toujours plus pressants.
Dans la foulée de la tuerie du 31 octobre, trois semaines à peine après le drame de Wendake, nous avons le devoir de repenser nos priorités.
Plus tôt cet automne, nous avons proposé d’adopter un programme universel de couverture publique de la psychothérapie. Ceci permettrait d’élargir rapidement et considérablement l’accès aux soins de santé mentale pour les Québécois. Au même moment, Québec solidaire pressait le gouvernement de pourvoir les nombreux postes de psychologues vacants dans le réseau public.
Ces propositions complémentaires m’apparaissent susceptibles d’améliorer significativement les soins en santé mentale au Québec, même si elles ne règleront pas tout à elles seules. Je ne doute pas que le Parti Québécois et la CAQ, notamment comme en témoigne l’annonce de 100 millions d’hier, soient eux aussi réellement préoccupés par cet enjeu. Chaque parti a sans doute une contribution utile à apporter.
Dans ce contexte, ma pensée se résume en deux mots : travaillons ensemble. Unissons nos forces, nos intelligences, nos volontés. Mettons en place une commission parlementaire transpartisane qui va se pencher sur les solutions envisageables à court et moyen terme, et faisons aboutir un plan qui soit à la fois révolutionnaire et efficace. Il faut maintenant que l’enjeu de la santé mentale soit élevé au rang de priorité nationale. Il le faut, et encore plus aujourd’hui, parce que les effets négatifs qui ont été exacerbés par la crise sanitaire vont se faire sentir bien au-delà de la COVID-19. C’est maintenant que nous devons agir.
Si la pandémie nous a appris une chose, c’est que les gouvernements peuvent agir rapidement et de manière décisive quand les circonstances l’exigent. C’est ce que les Québécois et les Québécoises attendent de leurs élus aujourd’hui.
Dominique Anglade
Cheffe du Parti libéral du Québec